Archive for the ‘les mots magiques des révolutionnaires’ category

Le gauchisme, forme de décomposition du communisme

décembre 11, 2019

L’auto dissolution de l’URSS et le remplacement du socialisme par l’économie de marché, après la faillite totale du système et l’abandon du rôle dirigeant du PCUS ont créé un vide là ou le fantasme du pays idéal cristallisait l’utopie et mobilisait des millions de gens à l’intérieur ou à l’extérieur de l’URSS. Les yeux de certains s’ouvraient alors sur le régime de terreur et de mensonge du stalinisme, d’autres prétendaient que il ne s’agissait que d’une déviation liée à la personnalité de Staline, les idéaux restant intacts, et la théorie toujours valable. Dans les pays « socialistes », les communistes se reconvertissaient rapidement en hommes d’affaires et s’arrangeaient pour conserver le pouvoir en changeant l’étiquette de leur mouvement qui devenait « démocrate » ou « populaire ».

Mais la cohérence très profonde de l’idéologie communiste, appuyée sur une vision de l’histoire construite « sur mesure » pour donner le sentiment d’une victoire inéluctable, et une filiation avec tous les moments révolutionnaires historiques arrimait le parti à un glorieux passé et à un avenir merveilleux. Lénine, lui, théorisait une vision de la prise du pouvoir par la force et le coup d’état, et l’instauration d’une dictature de la classe ouvrière, désignée comme porteuse de la régénération de la société. Enfin, il théorisait la construction d’un parti quasi militarisé , discipliné comme une force militaire, utilisant tous les moyens pour conquérir, puis conserver le pouvoir, présageant la dictature policière féroce qui pourchasserait toute forme d’opposition, dans et hors de ses rangs.

Armés de cette croyance en la victoire finale, les tenants de cette forme de millénarisme étaient prêts à tous les sacrifices et tous les crimes, puisque ils étaient du côté du Bien. Les ennemis étaient les bourgeois et les capitalistes ,bons à pendre avec la corde qu’ils vendraient à leurs exécuteurs.Aucun domaine n’échappait à ce clivage ( artistique, scientifique, juridique) de l’utilité révolutionnaire, aucune pitié ne devait atténuer la condamnation des « ennemis du peuple ». De plus, les bienfaits de cette vision du monde devaient s’étendre au reste du monde, qu’il le veuille ou non. Cet outil formidable de conquête du pouvoir était bien repéré par les ambitieux à qui il donnait la recette de la propagande qui devait rallier les militants, convaincus ou cyniques. Un grand nombre d’intellectuels, fascinés par la forme cohérente de cette utopie, donnaient leur onction au système, entraînant par leur prestige des foules d’idéalistes qui rejoignaient les masses de militants formatés. Le marxisme léninisme se présentait comme un bloc, des « saintes écritures » en quelque sorte qui était la Vérité absolue dont les locuteurs devaient utiliser la terminologie pour faire partie de la famille.

Mais cette Eglise, comme toutes les Eglises, secrétait des hérésies, divergeant avec le corpus orthodoxe sur tel ou tel point , au risque de mobiliser une inquisition qui disposait d’un arsenal de sanctions très variées allant de la critique exigeant une autocritique (abjuration) à l’exclusion (excommunication) et parfois à la mort avec ou sans aveu de sa culpabilité.

Lénine avait qualifié le gauchisme de maladie infantile du communisme. Ce qui apparaît à l’époque actuelle, c’est plutôt l’aspect sénilisé des partis communistes, qui n’ont plus comme adhérents que des vieux nostalgiques de l’empire soviétique et de la camaraderie militante et idéaliste, et des gestionnaires des places de pouvoir qui subsistent dans quelques citadelles ouvrières traditionnelles.

Le bloc monolithique a explosé en une multitude de chapelles. Les uns tentent de maintenir le vocabulaire communiste, s’accrochant aux mots magiques ( la lutte de classes, la solidarité du camp socialiste, la juste révolte contre la légalité bourgeoise et sa démocratie « formelle », les autres tentent un nouveau mélange avec la violence anarchisante et spontanéiste qui, elle, désigne l’état comme ennemi principal, alors que les communistes voulaient que l’Etat cchange de maître, pas que il s’affaiblisse.

L’apparition des problématiques identitaires à ouvert la voie à l’islamo gauchisme, qui change de prolétariat, en faisant des musulmans les nouveaux damnés de la terre. Là où la classe ouvrière était parée de toutes les vertus, ce sont les minorités immigrées qui sont maintenant désignées comme doublement victimes : sur le plan social , étant les plus pauvres, et sur le plan d,e l’intégration sociale ,étant parfois victimes d’une discrimination excluante .Là encore, le besoin de cliver le monde entre Bons et Mauvais aboutit à faire des musulmans les blancs agneaux victimes d’affreux bourgeois de plus racistes et colonialistes ( sans colonies d’ailleurs). C’est ceux que Lénine qualifiait de « lumpen prolétariat », pour leur absence de « conscience de classe  » malgré sa misère, qui est porté aux nues. L’alliance, cachée ou parfois revendiquée, avec les communautaristes déplace le front du combat, et en même temps divise les forces des gauchistes entre pro et anti communautaristes, défenseurs et critiques de la laicité. L’Etat centralisateur , lui , est désigné comme l’ennemi et l’oppresseur des nationalités (Catalogne, Pays Basque, etc..) . La classe ouvrière, menacée dans son existence même par la rétraction du tissu industriel, s’aligne sur l’extrême droite, faisant de celle ci le nouveau parti ouvrier. Le populisme, appuyé sur le nationalisme relancé contre l’Européisme des élites, reprend à son compte l’opposition riches/pauvres et promet la Lune aux crédules avec le protectionnisme et la prise du pouvoir légale: moins d’impôts et plus de prestations sociales. Les gauchistes sont prêts à enfourcher cette monture, mais l’extrême droite les a précédé dans cette posture. Prêts à s’allier à tous les adversaires du pouvoir, que ce soit les syndicats, les GJ, les Islamistes, rêvant d’une police désarmée face à leurs militants offensifs , les gauchistes sont une nébuleuse qui n’a plus de modèle universel. la Chine faisant très mauvaise figure pour ce rôle, et les dictatures d’extrême gauche:Madeiro au Vénézuela, Castro à Cuba , apparaissant clairement comme des dictatures policières. Seul Mélenchon défend ces régimes, allant, dans une poussée de stalinisme provocateur, jusquà défendre devant l’Assemblée Nationale la géniale médecine cubaine qui aurait découvert un vaccin contre le cancer du poumon (exemple typique d’une « fake news » absurde, le cancer du poumon n’étant pas causé par un virus, et étant donc inaccessible à une vaccination. On se croirait en URSS, à l’époque de la biologie truquée par Lyssenko au nom d’une biologie marxiste léniniste. Prêts à s’allier avec le diable islamiste, ou avec les diables séparatistes, et à vrai dire avec n’importe quel diable, moulinant les attaques contre le régime à tour de bras, les gauchistes ont pris l’ascendant sur les sociaux démocrates qui sont la version « modérée » des communistes, en perte de vitesse devant la radicalisation qui s’étend.L’échec des gauchistes grecs, chassés du pouvoir pour promesses non tenues, et l’échec des indépendantistes catalans, pour leur tentative médiocre. de coup d’état séparatiste raté, montrent que les gauchistes, bien qu’ayant renversé le rapport de force avec les sociaux démocrates, restent cantonnés à la marge politique, comme l’étaient les communistes il y a cinquante ans . Cela malgré leur pouvoir de nuisance et leur poids électoral non négligeable à cette époque . Héritiers d’une tradition militante dont ils se réservent le droit d’inventaire, influencés par le spontanéisme ambiant, ils pataugent dans un gloubi boulga théorique qui débouche sur des divisions et des querelles byzantines . Leur credo politique reste limité à la haine du flic et à la tentative d’être les plus virulents opposants au régime, ce qui est loin de la sophistication et de la systematisation de la stratégie des vieux partis communistes, appuyés sur les appareils d’état des pays déjà conquis. Version extrémiste et maximaliste des partis communistes, toujours tentés par l’escalade et par une vision crue et brutale du rapport de force, les gauchistes se considèrent comme une version « clean » des vieux partis communistes , nettoyée des crimes de ces partis, puisqu’ils n’ont pas exercé le pouvoir. Ils bénéficient de cette néo virginité qui maintient intact le pouvoir d’illusion et de rêve pour ceux qui n’acceptent pas la réalité comme elle est. La grande illusion est prête à renaître de ses cendres

GB