Avec la nouvelle année, placée sous le signe de la perspective de l’élection présidentielle, et avec la possibilité que le vaccin antivirus modifie la priorité accordée à la crise sanitaire, qui continuera certainement, mais sur un mode atténué, quels vont être les obstacles auxquels va se heurter Macron dans la lutte pour se placer en position favorable pour le scrutin décisif de 2022 .
La situation de Macron a quelque chose de paradoxal: sa popularité a gagné 10 points et se situe autour de 40%, ce qui est un chiffre très satisfaisant, et en même temps, on n’entend que un discours critique sur tout et n’importe quoi. La majorité des Français approuve les restrictions imposées pour lutter contre le virus, mais trouve à la fois que c’est trop et que c’est pas assez. La gauche est complètement explosée, réclamant l’unité et débordée par la multiplication des candidatures qui ouvrent un boulevard à Macron, les ambitions personnelles s’étalent sans vergogne, et il n’y a toujours aucune alternative crédible d’unité entre ultra gauche radicale, social démocratie moribonde et verts qui n’ont que des mesures partisanes à la bouche.
Le fond général est celui d’une crise grave de la société française (perte d’emplois, difficultés à trouver un premier emploi pour les jeunes, recul de la puissance économique) à laquelle le gouvernement a répondu par des aides sociales massives qui ont atténué la détresse sociale, mais provisoirement seulement. La paupérisation d’une couche sociale craignant le déclassement accentue le clivage social entre les précarisés et les sécurisés.
L’accentuation de la misère sociale, malgré les mesures de soutien le plus marqué en Europe, crée un danger de révolte spontanée que aucun parti n’arrive à récupérer.La critique permanente de l’autorité entraîne une remise en cause de ses décisions, en même temps que des agressions contre les forces de l’ordre qui sont culpabilisées et déligitimées. En même temps, les gens savent bien que l’épidémie, avec ses dizaines de milliers de morts et ses mesures de confinement inévitables pour tenter de la juguler est responsable de cette crise et que les gouvernements de tous les pays ont réagi à peu près de la même façon, plus ou moins rapidement à quelques jours près.
L’effondrement des partis de gouvernement « classiques » avec l’arrivée au pouvoir de Macron n’a laissé en place que les partis « populistes » avec un discours simpliste , chacun tirant à boulets rouges sur le pouvoir pour essayer de capter le mécontentement et la peur.
C’est ce qui crée une situation dangereuse. L’expérience de l’année 2019 où le mouvement des gilets jaunes a dans un premier temps obtenu l’approbation d’une majorité de la population, jusqu’à ce que l’opinion se retourne devant les déprédations et les violences qui accompagnaient de plus en plus les manifestations dont le but apparaissait comme de plus en plus confus.
Les élections municipales ont montré l’incapacité du mouvement à se structurer politiquement: le grand débat imaginé par Macron pour donner la parole aux Français et les 17 milliards d’euros lachés par le gouvernement ont réussi à démobiliser la majorité des manifestants, et montré que seuls les leaders extremistes ne se satisfaisaient pas de ces gains et voulaient continuer jusqu’à la chute du gouvernement. Les scores dérisoires ( autour de 0,1%) de leurs candidats ont montré le détachement des Français devant cette révolte anarchiste qui ne menait nulle part . Actuellement, les manifestations des restaurateurs et des artistes pour la réouverture de leur gagne-pain pendant le confinement sont restées limitées à cette revendication compréhensible et n’ont pas dégénéré en agression insurrectionnelle. Le gouvernement qui avait réagi avec une certaine lenteur à la dérive insurrectionnelle des GJ a fini par se positionner plus clairement, envoyant l’armée pour protéger monuments et institutions.Pour le moment,les Français, toujours râlant,mais considérant que le gouvernement malgré quelques « couacs » assure leur protection dans cette crise totalement inédite, ne tombent pas dans le piège de la « convergence des luttes » ou voudraient les orienter les « révolutionnaires » professionnels : CGT, PCF, PS,Insoumis. Ceux là tentent de greffer la vieille lutte des classes sur les mouvements de protestation qui leur échappent pour le moment.
Faute de savoir quelle tournure prendra la crise économique quand elle éclatera vraiment, on ne peut prévoir la forme que prendra la révolte face à elle. Mais le gouvernement a montré face aux GJ une capacité à gérer la crise sociale avec une intelligence qui fait penser qu’il a des atouts face à la prochaine qui se produira.